Imprimé
11 pages
Auteur(s)
Die Ruhe des Kalifen
Quand il ouvre au public en 1907 son théâtre d’ombres dans le quartier artistique de Schwabing, Alexander von Bernus veut proposer une nouvelle forme d’art dont il revendique la filiation romantique et qui, distincte des spectacles du Chat Noir à Paris, exploiterait davantage l’immatérialité de l’ombre pour s’aventurer sur les terres de l’âme et du rêve. Le mysticisme prégnant dans les cercles intellectuels et artistiques munichois au début du 20e siècle n’est pas étranger à ce projet visant « l'union la plus métaphysique de l'image, de la poésie et de la musique. » Karl Wolfskehl fait partie des co-fondateurs des Schwabinger Schattenspiele ; une de ses pièces, Wolfdietrich und die Rauhe Els, figure au programme d’inauguration du théâtre.
Die Ruhe des Kalifen se distingue des pièces plus oniriques d'Alexander von Bernus par son romantisme noir qu’illustre, dans une veine orientale, l’androcratie du calife. L’intrigue est inspirée d’un récit des Mille et une nuits (celui des 27e et 28e nuits) dont Max Henning a publié une nouvelle traduction en allemand entre 1895 et 1897. La communication entre les personnages est difficile, entravée par l’excès d’images qui opacifie les répliques ou par des échanges vifs très elliptiques. Si Karl Wolfskehl s’intéresse aux mythes et aux contes avant tout comme érudit, dans le sillage de l’influente tradition philologie des universités allemandes et de la nouvelle dynamique que connaît l’orientalisme scientifique au début du siècle, l’Orient fantasmé par les poètes répond aussi au goût pour le mystère, l’érotisme et l’esthétisme caractéristiques du Jugendstil.
Un époux se venge avec cruauté de sa femme infidèle
Au terme d’un échange sinueux et voilé avec son vizir, Walid le calife apprend que Gülnare, son épouse, le trompe avec son ami, le poète Tarik. C’est un coffre à linge suspect transporté par deux esclaves muets dans les appartements de Gülnare qui éveillent les soupçons du vizir. Furieux, le calife reporte les célébrations de l’Aïd pour se venger. Dans sa chambre, Gülnare vient de recevoir le coffre dans lequel se dissimule son amant. Un échange lyrique et érotique s’engage mais Walid frappe à la porte. Il s’impatiente tandis que Tarik se cache dans le coffre et que Gülnare range les linges. Sur le point de défaillir, elle lui ouvre enfin. Walid réclame un cadeau et choisit le coffre qu’il ordonne aussitôt de faire disparaître. Feignant de s’étonner de l’émotion de Gülnare, il demande aux esclaves de creuser un trou dans ses appartements et d’ensevelir le coffre. Pour achever sa vengeance, il appelle son vizir et, l’accusant d’avoir accusé à tort sa femme d’adultère, lui fait couper la langue et crever les yeux. Apaisé, il donne rendez-vous à son épouse le soir et décide de baptiser sa chambre « le repos du calife ».
Première représentation
Schwabinger Schattenspiele
Éditions et traductions
Karl Wolfskehl, Gesammelt Werke [Band 1], Hambourg, Claassen Verlag, 1960, p.312-322.