Imprimé
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La Tentation de Saint-Antoine
La Tentation de Saint-Antoine est l'une des pièces les plus jouées par les théâtres de marionnettes à fils au 19e siècle, notamment en France par les compagnies itinérantes qui jouaient dans les Foires. Cette version est une reconstruction du texte traditionnel réalisée par Gaston Baty, à partir de la fusion de plusieurs manuscrit. L’un de ces manuscrits appartenait à la dynastie des Guentleur, marionnettistes depuis 1818. Un autre est celui que Louis Levergeois a appris par coeur vers 1875, d'après la version qu'Auguste Legrain jouait.à Rouen depuis plusieurs décennies, et qu'allait voir régulièrement Gustave Flaubert. Gaston Baty recense six autres versions de cette pièce.
Le texte de la Tentation s'est progressivement développé dans la deuxième moitié du 18e siècle, à partir d'un pot-pourri de chansons libertines composé par Michel-Jean Sedaine vers 1750, et que les marionnettistes ont reprises en effaçant ses dimensions grivoises et anticléricales. Le clou de ce spectacle était les tourments infligés par la troupe des démons au cochon compagnon de saint Antoine: on lui attachait un morceau d'étoupe enflammé au bout de la queue pour lui faire traverser la scène. Chez certains marionnettistes, c'était un porcelet vivant qui était ainsi employé.
Le sujet de la pièce est repris au récit chrétien de la tentation de saint Antoine le Grand (251-356), un ermite confronté aux assauts du Diable, qui tente de le détourner de sa foi par diverses épreuves, visions et séductions. Le récit de sa vie, rédigé par Athanase d'Alexandrie au IVe siècle, a été repris dans La Légende dorée de Jacques de Voragine.
Un saint résiste aux tentations
La pièce s'ouvre sur un conseil des diables où Pluton, furieux de voir Antoine détourner les âmes des Enfers par ses prières, ordonne aux démons de le capturer, promettant une récompense à celui qui y parviendra. Proserpine, son épouse, demande la permission d'aller seule séduire le moine. Antoine la reconnaît immédiatement et résiste à ses charmes.
Pluton tente alors une autre approche en se faisant passer pour un mendiant pris dans la tempête. Dévoilé, il demande à Antoine de lui céder son âme, mais le moine réaffirme sa foi en Dieu. En réponse, les démons surgissent, entraînent Antoine dans une danse infernale et mettent le feu à la queue de son cochon. Ils ravagent ensuite son ermitage avant de lui annoncer qu’ils transformeront son fidèle compagnon en saucisse.
À bout de forces, Antoine implore Dieu, qui envoie un ange pour rebâtir la chapelle et transformer Pluton en corbeille de fleurs. En apothéose, Antoine s’élève au ciel, suivi de son cochon.
Éditions et traductions
Gaston Baty, Trois p'tits tours et puis s'en vont. Les théâtres forains de marionnettes à fils et leur répertoire 1800-1890. Paris: Odette Lieutier, 1942