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20 pages
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Der Totengräber von Feldberg
La lecture de Des Knaben Wunderhorn (Le Cor merveilleux de l’enfant) (1806-1808), recueil de chansons traditionnelles publié par Achim von Arnim et Clemens Bretano, et l’amitié avec le poète Ludwig Uhland, fervent promoteur de la poésie populaire, façonnent le goût de Justinus Kerner et son écriture. Durant son voyage de formation en 1808-1809, de Hambourg à Vienne, à l’issue duquel il publie un récit de voyage poétique et autobiographique Reiseschatten (1811), Justinus Kerner assiste à des spectacles de marionnettes et écrit des pièces pour « ombres chinoises ». Sa correspondance avec Ludwig Uhland témoigne de leur réflexion originale sur le théâtre d’ombres qui, propice aux projections imaginaires et libre de suggérer un monde plus détaché des lois et des contraintes physiques, offre à leurs yeux une attirante alternative aux représentations réalistes.
Der Totengräber von Feldberg est insérée à la fin du deuxième chapitre de Reiseschatten, alors que le narrateur se rend à l’auberge de la petite ville où il se trouve et assiste à la représentation d’une troupe de comédiens qui, malgré les vives réprobations du public cultivé, propose de jouer une pièce différente de celle initialement annoncée intitulée « Der Totengräber von Feldberg ».
Jouée pour la première fois en 1907, dès l’hiver de la première saison des Schwabinger Schattenspiele à Munich, cette pièce a une importance particulière pour Alexander von Bernus, le principal fondateur et artisan du théâtre d’ombres de Schwabing. Dans ses mémoires de jeunesse, Wachsen am Wunder (1973), il dit avoir lu ce texte au lycée et découvert, fasciné, un nouveau genre. C’est effectivement dans le sillage des romantiques souabes, Ludwig Uhland et Justinus Kerner, qu’il détermine ensuite les ambitions artistiques des Schwabinger Schattenspiele.
Un homme pactise avec le diable pour réussir à voler
Le printemps égaie les oiseaux et les hommes : un enfant s’émerveille de voir un papillon s’envoler, des jeunes garçons jouent au cerf-volant et le fossoyeur admire, envieux, le héron dans le ciel. Son voisin forgeron lui annonce que ses ailes sont prêtes. En vain, il essaie de le faire renoncer à son rêve d’envol. Elzbeth est désespérée par l’obsession de son mari et raconte les rêves du fossoyeur ; le dernier, particulièrement macabre, l'inquiète... Pendant ce temps, le jardiner, épris d’Elzbeth, écarte aisément son naïf rival, le poète Blumenstengel, qui croit momentanément s’être métamorphosé en séduisant tournesol. La nuit, le fossoyeur s’efforce encore et encore de décoller, invoquant la lune et les étoiles, avant de répondre favorablement aux avances du diable... Quelques jours plus tard, alors que le jardiner et la jeune Elzbeth roucoulent en célébrant les fleurs du printemps, la femme du fossoyeur, dévastée, raconte l’apparition nocturne de son mari qui, absent depuis quelque temps, lui a ordonné de mourir après un ultime et glacial baiser. Deux tombes ont été creusées. La nuit, le fossoyeur appelle la Mort qui tarde à venir. Aux coups de minuit, il se précipite chez lui, muni d’un couteau. Le lendemain, on apprend qu’il a tué sa femme et sa fille, s’est dénoncé au tribunal et a été pendu. Le jardinier pleure Elzbeth et la foule déplore la folie du fossoyeur.
Première représentation
Schwabinger Schattenspiele
Éditions et traductions
Justinus Kerner, Reiseschatten: von dem Schattenspieler Luchs, Heidelberg, Braun, 1811