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Der Wurstel
Les démêlés du théâtre de marionnettes avec la censure d'Etat en Autriche remontent au 18e siècle. En 1838, le chancelier Clemens von Metternich (1773-1859) interdit le texte parlé dans le « théâtre de Kasperl », c'est-à-dire le théâtre de marionnette à gaine. Le Kasperl autrichien sera désormais muet. La relation qu'a faite l'écrivain Felix Salten (1869-1945), plus tard mondialement connu comme l'auteur de la nouvelle animalière Bambi (1923), en 1912, d'une représentation à la foire du Prater, dit « Wurstelprater » par dérivation du nom de Hanswurst, livre donc un témoignage rare, si ce n'est le seul, sur le répertoire des pièces traditionnelles pour marionnettes à gaine à Vienne, qui, selon l'historien Hans Richard Purschke, s'avère chez lui sensiblement différent de celles qu'on jouait à la même époque en Allemagne (Die Puppenspieltraditionen Europas: Deutschsprachige Gebiete, Bochum, Deutsches Institut für Puppenspiel, 1986, 96-98). On en retrouve pourtant des traces dans le théâtre de marionnettes de tradition austro-hongroise, fût-il plus tardif comme la pièce d'August Franz Rokos Der Schmied von Jüterbock und sein Geselle Kasperl (1922). A l'époque de Salten, le « Wurstel » s'adresse expressément au jeune public : l'écrivain s'attarde à la fin de son récit sur le succès, auprès des enfants, du lapin vivant qui intervient à la fin de la pièce. Le personnage type du Juif mercantile était sans doute moins populaire, mais Salten, qui était lui-même d'une famille juive de Budapest, rapporte néanmoins fidèlement son rôle, tel qu'il a pu le voir dans cette ville de Vienne où l'antisémitisme avait encore de belles heures devant lui.
Le meurtrier malgré lui
Kasperl a trouvé une enclume et s'amuse avec sa femme à frapper dessus à coups de marteau. Leur jeu va de plus en plus vite, l'un et l'autre sont maladroits et Kasperl finit par tuer sa femme d'un coup sur le crâne. Vient un médecin pour constater la mort. En voulant lui montrer comment l'accident est arrivé, Kasperl le tue à son tour. Il cherche alors à se débarrasser des corps en les enfermant dans une boîte pour les vendre au Juif, mais celui-ci veut marchander et Kasperl furieux l'assassine. Le diable vient alors chercher celui qui est devenu trois fois meurtrier et il le tient déjà au collet, quand un ange survient pour le sauver et ressusciter sa femme. Pour fêter cela, ils vont tous deux chercher un lapin vivant, qu'ils placent sur une petite balançoire et font se balancer devant le public ravi.
Éditions et traductions
Felix Salten: Wurstelprater, Vienne/Leipzig, Brüder Rosenbaum, 1912, 116-123