Imprimé
78 pages
Auteur(s)
La Comica del Cielo
ovvero La Baldassara
L'argument de La Comica del Cielo (La Comédienne du Ciel) est repris à La Gran Comedia de la Baltasara, une pièce écrite par Luis Vélez de Guevara, Antonio Coello et Francisco de Rojas Zorrilla, créée en 1634 puis publiée en 1652, et qui s'inspirait de la vie de l'actrice Francisca Baltasara de los Reyes. Celle-ci, après ses débuts en 1604 ou 1605, avait obtenu de très grands succès dans différentes compagnies de Madrid, notamment pour les rôles où elle se travestissait en homme, avant de mettre fin brusquement à sa carrière (selon la légende, en plein milieu d'une représentation) et de se retirer dans un couvent.
Giulio Rospigliosi compose son "oeuvre scénique sacrée" sur ce sujet pendant son séjour à Madrid entre 1644 et 1653. Son manuscrit est conservé à la Biblioteca Nazionale Centrale Vittorio Emmanuele II (CNMD\0000066729). Devenu pape sous le nom de Clément IX, l'auteur fait représenter son oeuvre à l'occasion du Carnaval 1668 au palais Rospigliosi sur une musique d’Antonio Maria Abbatini et avec une scénographie du célèbre sculpteur Gian Lorenzo Bernini, dit Le Bernin.
Il est impossible d'établir avec certitude si La Comica del cielo, comme l'écrivent certains historiens à la suite d'Alessandro Ademollo (I teatri di Roma nel secolo diciasettesimo, 1888), a bien été représentée par des marionnettes. Le seul indice connu est un bref article publié dans les Avvisi di Roma pendant le Carnaval de 1668, où il est rapporté que la princesse de Rossano, en visite chez les moniales de Santa Maria in Campo Marzio, fait jouer dans la cour du monastère le marionnettiste Domenico Filippo Patriarca, et que La Comica del cielo y est représentée. Deux hypothèses s'opposent: soit il s'agissait de deux spectacles distincts, soit Patriarca a présenté avec ses marionnettes une version réduite du spectacle en reproduisant les décors du Bernin dont le nom est aussi évoqué. Il paraît invraisemblable, en tous les cas, que la création au palais Rospigliosi ait été jouée en marionnettes, car les éditions des Avvisi di Roma qui en rendent compte n'en font jamais mention.
Le spectacle raconte, dans la veine du Véritable Saint-Genest de Rotrou (1647), l’expérience d’une actrice appelée par Dieu à se retirer du monde. Le premier acte donne ainsi à voir une pièce dans la pièce, mais aussi un théâtre garni d’un public nombreux. Le personnel héroïque, composé de Rodrigo, Alvaro et Beatrice, est flanqué d’un duo comique, grâce aux personnages de Biscotto et de Lisa. Ces derniers sont toutefois les premiers à se convertir aux côtés de l’édifiante Baldassara. La pièce s’ancre dans l’esprit allégorique des moralités: le sort des personnages se joue autour du duel qui oppose Penitenza au Démon dans l'Acte III. La scène 6 de l’Acte II, centrale en termes d’effets spectaculaires, donne à voir la Sainte Croix se détachant d’un rocher pour barrer la route à Baldassara.
Une comédienne se retire du monde
Au Prologue, Talia (Thalie) et Urania (Uranie) annoncent une histoire édifiante. Baldassara, comédienne à succès admirée d’Alvaro et de Rodrigo, est tourmentée: alors qu’elle joue le rôle de Clorinda aux côtés de Beatrice, Lisa et Biscotto, dans une adaptation théâtrale de La Gerusalemme liberata de Torquato Tasso, elle est si perturbée qu’elle rate son entrée. Elle comprend que son tourment vient du fait que, bien qu'elle joue le rôle d'une jeune chrétienne, elle est restée sourde aux appels de Dieu. Au beau milieu de la représentation, elle part s'exiler dans le désert, suivie par les fidèles Biscotto et Lisa qui tentent de la détourner de son entreprise. Beatrice, elle, n’a que mépris pour sa rivale; les autres comédiens s’excusent devant le public, qui semble enthousiaste devant la prestation de celle qu’ils nomment la "Comica del cielo".
Dans son exil, Baldassara découvre la beauté de la solitude, alors que Lisa et Biscotto ne voient qu’horreur. Elle refuse leurs injonctions à retourner à Valenza. Le Démon, déguisé en chasseur, tente Alvaro, parti en quête de sa bien-aimée: le jeune homme retrouve Baldassara, qui l’engage à offrir sa vie à Dieu. De désespoir, il part se jeter du haut d’un rocher. Baldassara veut l’en empêcher, mais un rocher en forme de croix s’interpose: elle se prosterne devant la puissance divine. Biscotto, en habits d’ermite, a décidé de rester à ses côtés, malgré les objurgations de Lisa. Pendant son sommeil, le Démon envoie à Baldassara de quoi la tenter: à son réveil, elle le repousse d'un signe chrétien, ce qui fait disparaître l’enchantement. Biscotto, en revanche, malgré les avertissements de Lisa, goûte un gâteau du Démon: il en conserve l’amertume en bouche, mais parvient à chasser le Démon. L’Acte II se termine par un ballet.
Beatrice arrive dans le désert, après la mort de Tafer qu’elle avait suivi sur les mers et qui a été vaincu par Rodrigo. Dans une scène nocturne, Baldassara et Biscotto découvrent Beatrice et parviennent à l’empêcher de se donner la mort. Rodrigo, arrivé au milieu des retrouvailles, veut tuer Beatrice pour se venger de son infidélité: Baldassara s’interpose et l’enjoint à se tourner vers Dieu. Après ces multiples conversions, Penitenza (la Pénitence) apparaît à Baldassara pour lui apporter sa récompense; elle affronte le Démon et triomphe de lui. Comme Alvaro s’apprête à retrouver sa belle grâce à l’aide de Lisa, il trouve Baldassara morte, au milieu d’un chœur d’anges et d’âmes heureuses.
Autres titres
Première représentation
Palazzo Rospigliosi
Éditions et traductions
Giulio Rospigliosi, Melodrammi sacri. Firenze: Studio Editoriale Fiorentino, 1999.