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25 pages
Auteur(s)
Le Secret du manifestant
Drame express en cinq actes
A Paris, le cabaret du Chat Noir organise des spectacles d’ombres pendant presque onze ans. L’« inauguration des ombres japonaises » est annoncée le 26 juin 1886 dans la revue. Le théâtre d’ombres est pourtant en activité depuis déjà quelque temps car la même annonce précise que L’Eléphant en est à sa 195e représentation. Jusqu’à la mort du fondateur du cabaret, Rodolphe Salis, en mars 1897, le théâtre du Chat Noir, techniquement conçu par le peintre-décorateur Henri Rivière, présente presque une quarantaine de pièces. A l’instar des cafés concerts, puis comme le feront d’autres établissements de variétés et les music-halls, le Chat Noir offre des soirées éclectiques où s’alternent des pièces aux registres et aux formats variés : « outre la pièce principale, chaque spectacle comprenait de petits levers de rideau, de jolies fantaisies, en trois ou quatre tableaux » (mémoires de Henri Rivière). Trois types de pièces constituent le répertoire du Chat Noir : les pièces chantées, les pièces récitées et les pièces bonimentées.
Le Secret du manifestant est une pièce d'ombres récitée. Le discours versifié du récitant accentue la distance ironique ; l'auteur moque l'institution policière, ses dérives et son incompétence, alors que le maintien de l'ordre devient un enjeu politique majeur sous la Troisième République.
Un passant énigmatique résiste à tous les coups
Des brigades de police sont à la recherche d’une manifestation. Étonné de voir autant d’agents, un passant lève les bras de surprise. Le brigadier Cassepif se jette sur lui avec ses hommes et un agent lui donne des coups de pieds. Le passant reste imperturbable. Cassepif conduit le passant au commissariat et le présente comme un assassin. Le commissaire, ravi, ordonne son passage à tabac. L’homme reste impassible et paraît plus fringant que jamais. Accusé de lâche, il est libéré et part aux bras de deux dames apostrophées dans la rue. Un orage éclate et les brigadiers passent, éreintés. Crachant leurs poumons, ils se retrouvent à l’hôpital. Alors qu’ils sont sur le point de mourir, le passant se présente et leur donne le secret de son extraordinaire résistance : en tant que député, haï par la police, il a subi tant de coups que sa peau endurcie est désormais insensible. Sarcey apparaît et clôt la pièce par la moralité : « l’habitude est une seconde nature ».
Première représentation
Théâtre du Chat Noir
Éditions et traductions
Fernand Fau, Jacques Ferny, Le Secret du manifestant, drame express en cinq actes, Paris, Fromont, 1894.