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80 pages
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Die Geheimnisse der zwölf heiligen Nächte
Dans les années 1920, Leo Weismantel, qui avait pu voir les silhouettes des Schwabinger Schattenspiele lors d’une visite au couvent de Neuburg, développa toute une pédagogie autour du théâtre d’ombres. Très lié aux associations théâtrales de jeunesse, il publia en 1930 le manuel Schattenspielbuch qu’il destinait à ces associations mais aussi aux jardins d’enfant, aux écoles et aux familles. La première partie du manuel présente la démarche de l’auteur et fournit des conseils techniques. La deuxième partie propose aux amateurs plusieurs pièces, parmi lesquelles des chansons traditionnelles du Knaben Wunderhorn (Le Cor merveilleux de l’enfant) et de nombreuses scènes à sujets bibliques. Die Geheimnisse der zwölf heiligen Nächte (Les Mystères des douze nuits saintes) constitue la troisième et dernière partie de l’ouvrage.
Dans un préambule, Leo Weismantel indique que ce cycle diffère de ses autres pièces pour jeune car il a une vocation liturgique : la représentation des mystères doit ponctuer les semaines qui précèdent Noël et constituer des cérémonies théâtrales qu’il appelle « jeu cultuel » [religiöses Kultspiel]. Chaque mystère dialogué est introduit par un texte narratif lu par une récitante [Vorsagerin]. Leo Weismantel reprend les Évangiles canoniques de saint Luc et saint Matthieu pour représenter l’Annonciation, la Nativité, le massacre des Innocents et la fuite en Égypte mais à maintes reprises il s’en éloigne. Il ajoute des épisodes des Évangiles apocryphes, des motifs légendaires, des songes, des visions et il introduit d’autres personnages comme les deux Romains, Sixtus et Gregorius, le berger aveugle, la veille femme et ses deux enfants.
Inachevé, ce cycle de neuf mystères fut pourtant publié. Leo Weismantel le présente comme un premier essai, une ébauche à parfaire. Il est le fruit d’une démarche originale et relativement inédite pour envisager un théâtre d’ombres religieux en Europe.
Épisodes bibliques de la Chute à la fuite en Égypte
Dans le premier mystère intitulé Die Fülle der Zeit, la récitante raconte la chute d’Adam et Eve. Dieu et Chérubin apparaissent ensuite en ombres. Ce dernier implore Dieu de déraciner l’arbre maudit. Mort et putride, l’arbre est enterré par des anges sur le mont Golgotha et Dieu annonce la destinée tragique de son fils sur Terre.
Le deuxième mystère Die Botschaft des Engels (Le Message de l’ange) est consacré à la Vierge. Après un chant de l’assemblée, la récitante raconte trois histoires qui témoignent de la sainteté de la Vierge. Dans la première, le fils de l’empereur veut rencontrer la Vierge pour la séduire mais il est empêché par un chérubin qui veille sur la maison. La deuxième histoire dénonce la lâcheté du grand prêtre Caïphe qui craint d’être traité de fou s’il témoigne de la destinée extraordinaire de la Vierge. A chaque fois, la Vierge perçoit la menace en rêve puis Dieu apparaît et la rassure. Dans le troisième récit, la Vierge se rêve sur la lune en train de porter l’Enfant. Après ces récits, la scène de l’Annonciation est représentée en ombres.
Intitulé Die Hochzeit der Lilie mit der Narzisse (Le Mariage du Lys et du Narcisse), le troisième mystère fait intervenir pour la première fois le personnage de Joseph. La scène jouée en ombres représente le départ des prétendants au mariage avec Marie. Différents candidats se présentent (le fils de l’empereur, un berger) mais le choix de Marie est guidé par l’arche d’alliance : l’élu sera celui dont le bâton de marche redevient vert en touchant l’arche. Joseph, qu’un rêve prémonitoire a conforté, apporte sa canne, le bois mort fleurit et le mariage est scellé.
Dans le quatrième mystère, Der Ruf des Kaisers (L’Appel de l’empereur), la récitante rappelle en préambule la décision de l’empereur de recenser tous les hommes de son empire. Trois scènes jouées en ombres représentent ensuite trois exemples d’appréciation de la situation par le peuple qui peine à déchiffrer la prophétie en train de s’accomplir. Deux soldats y voient la confirmation de la toute‑puissance de l’empereur ; deux bandits craignent un grand danger et prennent la fuite ; seule une vieille femme décèle l’arrivée imminente du Messie. Intimement persuadée que le recensement est un signal et que la venue du Messie dans sa ville natale approche, elle se met en route avec ses enfants, mais la traversée du désert est périlleuse et ils mourront d’épuisement.
Au début du cinquième mystère intitulé Das Geheimnis der Nacht (Le Mystère de la nuit), la récitante raconte l’arrivée de Joseph et Marie à Bethléem. Après la lecture, le jeu d’ombres représente Marie qui exprime sa détresse, son sentiment d’abandon et son inquiétude. Seule dans la nuit, elle implore le monde et les hommes de reconnaître son fils divin et de venir le célébrer. Elle redoute la fin tragique à laquelle il est condamné et qui lui apparaît en vision.
Deux nouveaux personnages apparaissent dans le sixième mystère Die Geschichte der Hirten (L’Histoire des berger). Les deux Romains, Gregorius et Sixtus, veillent, déguisés en bergers parmi les bergers de Bethléem. Sixtus méprise les bergers juifs, injurie un berger aveugle et réfute ses visions prophétiques. Il n’aperçoit pas l’étoile ni le chœur des anges. A l’inverse, Gregorius se montre attentif aux présages, il est à l’écoute du berger aveugle, il voit l’étoile et entend le chœur céleste. Les deux Romains décident de se séparer, le premier pour prévenir le roi, le second pour suivre les bergers.
Au début du septième mystère, intitulé Die Leiden des Königs Herodes (Les Souffrances du roi Hérode), la récitante présente le roi comme un homme malade qui, les nuits de pleine lune, traverse son palais en délirant. Après ce préambule, un dialogue entre deux serviteurs effrayés est joué en ombres. Les deux hommes redoutent de croiser le roi possédé qui erre dans le palais. Hérode est pourchassé par l’esprit d’un homme, Antinoos, qu’il a fait assassiner. Sixtus arrive et annonce au roi la venue du Messie. Hérode ordonne de faire massacrer tous les enfants de moins de deux ans. La dernière scène montre l’ombre du roi fou en train de chasser les diables qui ricanent et pénètrent son corps.
Le huitième mystère intitulé Die Anbetung der Magier (L’Adoration des Mages) est introduit comme les autres par une lecture de la récitante qui décrit la Vierge inquiète et soucieuse de protéger l’Enfant. Eve vient prévenir la Vierge du destin tragique de son fils mais aussi de leur glorieuse montée au ciel. Les bergers et les rois mages arrivent ; le Romain Gregorius prévient la sainte famille des intentions d’Hérode et de la nécessité de fuir. La scène d’ombres s’interrompt pour laisser place aux interventions d’un chœur et de la récitante. L’intermède évoque ensuite longuement la ruse d’un messager d’Hérode qui piège les habitants de Bethléem avant le massacre des enfants.
Le dernier mystère, Die Flucht nach Ägypten (Le Fuite en Égypte), fait reparaître les deux Romains. Grégorius parvient à distancer Sixtus et conduit la sainte famille en Égypte.
Éditions et traductions
Leo Weismantel, « Die Geheimnisse der zwölf heiligen Nächte », Schattenspielbuch, Augsburg, Benno Filser, 1930, p. 202‑282.